Napoléon, notre héros national, l’homme sur qui nous fondons une partie de la gloire de la France, accompagné de quelques autres comme Voltaire ou Rousseau, ne nous ont pas fait que du bien. Si l’on a écrit des légendes sur eux, si on les vénère encore, ce n’est que parce que nous refusons de les voir tels qu’ils étaient.
C’est vérifiable : ces hommes n’agissaient pas en conformité avec leurs paroles, leurs écrits, mais on n’a voulu raconter une histoire qui fait partie du roman national.
Actuellement, un courant veut détrôner ces statues pour en mettre d’autres mais de la même façon, en niant certaines réalités, on peut leur enlever la tête, elles sont dans l’inconscient national.
Parlons de Christophe Colomb, par exemple : les missionnaires qui sont arrivés avec lui sont vus comme de cruels colonisateurs alors qu’ils ont arrêté par leur action civilisationnelle le cannibalisme dans beaucoup d’endroits du globe, d’autres ont mis fin à des pratiques du partage des femmes, ou de la polygamie qui est le partage d’un homme , pourtant, dire que ce sont des chrétiens en fait automatiquement des gens suspects. C’est les uns contre les autres.
Le nihilisme des philosophes et de beaucoup d’autres a fait place à un athéisme décontracté qui donne prétexte à toutes les dérives contre les gens qui osent encore avoir foi en un dieu, quel qu’il soit.
Si la parole majoritaire est une parole d’intimidation face à ces minorités, celles – ci ne peuvent que se rebeller car la laïcité a fait place à l’intolérance au nom du droit à tout dire, tout montrer, tout oser.
Napoléon, trompé par Joséphine, a limité les droits des femmes, son code civil continue à le faire et s’inspire des préceptes religieux qui ne sont pas ceux d’un démocrate. On ne l’a pas encore vidé de certains contenus, et la mentalité qu’il dégage n’est pas celle de l’égalité. N’étant pas une spécialiste en droit, je ne donnerais pas d’exemple, mais la tutelle des hommes sur les femmes a perduré jusqu’aux années soixante dix. D’autre part, malgré les principes de liberté de la Déclaration des droits de l’homme, il a rétabli l’esclavage*.
Voltaire, qui vivait des deniers des grands de ce monde, et a fait de la prison en France, ne s’est pas privé d’être raciste et antisémite, mais on se garde bien de le dire, pourtant il n’y a qu’à lire ses écrits, ses pièces de théâtre.
Emile Rousseau dans son « Emile , de l’Education » , explique l’art d’élever les enfants alors qu’il a abandonné les siens et qu’il se fait nourrir par les unes et les autres, il prône l’homme à l’état de nature, « l’homme sauvage » , un homme corrompu par la société qu’il faut « destructurer ». C’est ce genre d’auteurs qu’on donne en exemple dans les écoles de la République : lisez le Seigneur des mouches de William Golding qui donne une autre vision de la nature humaine quand elle revient à l’état de nature.
Comment obtenir l’adhésion de gens venant de la diversité culturelle dont les parents ont peut-être vécu dans une misère proche de l’état dit « sauvage » , ils ne rêvent que de vivre dans la société de consommation.
Actuellement, on réédite l’œuvre complète du « grand Céline », comme une sorte d’adhésion : une lecture de belle facture qui ne manquera pas de faire des ravages dans l’imaginaire social.
Qu’on ne s’étonne pas que notre vision nombriliste de l’histoire et de la littérature, n’intéresse plus les jeunes et qu’on donne prise à des mouvements d’effacement de la culture !
Napoléon a dit « les chiffres sont comme les hommes, ils n’acquièrent de valeur que par leur position « . Faut-il penser qu’il était cynique ? Faut-il croire qu’il le pensait sincèrement, lui chrétien et, franc-maçon du bout des lèvres, venue d’une ile, trop orgueilleux pour se plier à une société secrète ?
Ce héros dont les batailles sont toujours reconstituées de nos jours, aurait dû dire : « leur position et leur nombre », étant donné ceux qui sont morts sous ses ordres. Napoléon, s’il a fait la campagne d’Égypte pour couper la route aux anglais , y était aller chercher de l’argent auprès des juifs du Moyen-orient , mais il a échoué car ceux-ci y vivaient bien et ont décliné ses propositions, et s’il en est revenu avec des trophées ce fut après avoir fait cruellement assassiner des milliers de prisonniers arabes sur les plages, devant St-Jean d’Acre qu’il n’avait pas pu reconquérir à cause d’une épidémie de peste, au cours d’un siège interminable.
Cessons ne nous gargariser de nos grands hommes, il n’est pas question d’avoir honte de notre histoire ou de notre littérature mais de restituer un peu de vraisemblance, d’honnêteté et de justice, car l’injustice perdure, notamment en Haïti qui est une ile dans le chaos.
Ce serait plus facile d’enseigner. Il faudrait d’ailleurs coupler l’histoire avec la philosophie. Apprenons que les grands hommes et les écrivains (et les autres), ne sont que des hommes et qu’ils se sont trompés et (peut-être) de bonne foi Ce n’est pas se diminuer que de faire preuve d’objectivité, alors qu’on parle d’intégration à longueur de journée.
L’assemblée constituante avait aboli l’esclavage en 1793 *, Napoléon l’a rétabli parce qu’il avait besoin d’argent pour faire la guerre aux royalistes qui nous entouraient, il a pillé toute l’Europe en mettant sur les trônes conquis, ses généraux mariés à ses sœurs, dont les descendants se pavanent encore dans des cours d’Europe**.
Toutes les civilisations se sont construites sur le dos des autres, c’est l’aspect animal de la nature humaine. On n’est pas vraiment dans le bon sauvage, ni dans l’homme civilisé ! Nous le voyons sous nos yeux à chaque guerre. L’homme est un loup pour l’homme, même si l’on essaie de réhabiliter le loup qui prolifère.
* proclamation de l’abolition de l’esclavage dans cette île en 1793. 4 février 1794 : Adoption du décret d’émancipation et d’abolition par la Convention en France, suite aux révoltes qui éclatent en août 1791 à Saint-Domingue (Haïti).
**La maison Bernadotte est une famille d’origine française qui occupe depuis 1818 le trône de Suède et qui régna également sur la Norvège de 1818 à 1905.