La force de la bienveillance : S. O. S.

Matthieu Ricard, français, devenu moine bouddhiste qu’il n’est plus nécessaire de présenter (chercheur en génétique cellulaire), interprète français du Dalaïlama depuis plus de quarante ans, nous parle des vertus de l’altruisme au quotidien.

Dans son livre « Plaidoyer pour l’altruisme » (chapitre 25 : les champions de l’égoïsme) , Mathieu Ricard veut nous nous démontrer que l’altruisme est une nécessité, voir une urgence qui s’impose comme la solution à nos maux contemporains 

« La philosophe Ayn Rand a donné corps à l’individualisme extrême qui va croissant aux États-Unis. Quelles sont les erreurs morales et intellectuelles de sa doctrine. La clé de voute de son édifice est : le désir fondamental de l’homme étant de rester en vie et d’être heureux, il s’ensuit qu’il doit être égoïste.

C’est la faille logique.

« L’altruisme n’est ni sacrificiel, ni facteur de frustration, mais constitue l’une des principales sources de bonheur et d’épanouissement de l’être humain. Comme l’écrivent le père et le fils, l’un généticien, l’autre philosophe  Lucas et Francesco Cavalli-Sforza  : l’Éthique est née en tant que science du bonheur. Pour être heureux, vaut-il mieux s’occuper des autres ou penser exclusivement à soi ? Les recherches ont montré que la satisfaction engendrée par les activités égocentrées  était moindre que celle qui découle des activités altruistes.

Le philosophe James Rachels dit : En vertu de quelle différence puis-je me considérer si spécial par rapport à autrui ? Suis-je plus intelligent ? Ai-je accompli plus de choses ? Est-ce que je jouis plus de la vie que les autres ? Ai-je davantage le droit de vivre et d’être heureux que ceux qui m’entourent ? En conséquence, promouvoir l’égoïsme comme une vertu morale, est une doctrine aussi arbitraire que le racisme. En vérité nous devons nous préoccuper des intérêts et du bien-être  d’autrui pour exactement les mêmes raisons qui nous font nous préoccuper de nos droits et de nos aspirations, de nos joies et de nos souffrances. »

« Pour les fondateurs de la psychanalyse : l’altruisme serait une compensation malsaine de notre désir de nuire… l’agressivité serait un trait indestructible de la nature humaine.

Dans Freud, les sentiments prosociaux naitraient uniquement d’un sentiment de culpabilité et de mécanismes de l’ego, pour gérer les restrictions que la société impose aux pulsions agressives innées de l’individu, ainsi que les demandes du surmoi.

Darwin était au contraire persuadé que le sens moral était inné chez l’homme, et a été acquis au cours de l’évolution. Divers travaux ont montré que le sens moral se manifeste spontanément chez les jeunes enfants* (ici on parle de petits d’âge pré- scolaire qui ne marchent pas encore ou qui commencent à marcher) et n’est pas attribuable à l’influence des parents, aux exigences que la société imposent, comme l’avait dit Freud. Dès le plus jeune âge l’enfant à le sens de l’équité et considère que faire du mal à l’autre est répréhensible… »

« La psychanalyse se décrit souvent comme un moyen de connaissance de soi plutôt que comme une thérapie. Elle s’oppose à toute forme d’évaluation globale de l’efficacité de ses méthodes. Mais un rapport de l’Inserm prenant suffisamment de cas pour évaluer l’efficacité de la psychanalyse, montre que les bienfaits thérapeutiques ont été jugés quasi inexistants en comparaison avec les thérapies comportementales et cognitives, qui elles ont prouvé leur efficacité pour un nombre important de troubles… »

« Le fait de suivre une thérapie psychanalytique entraîne fréquemment une augmentation de l’égocentrisme et une diminution de l’empathie. Moscovici, psychanalyste social, a conclu que dans la plupart des cas, les psychanalystes arrogants, fermés, adonnés à l’introspection, se retirent toujours de la communication avec le groupe. Quant au psychiatre Baruck, il leur reproche de renforcer les conflits interpersonnels dans le mesure où le sujet psychanalysé « voit souvent avec acrimonie, ses proches, ses parents, son conjoint, qu’il rend responsable de ses maux ». Certains sujets deviennent extraordinairement agressifs, sont d’une extrême sévérité pour les autres qu’ils accusent sans cesse, ce qui fait d’eux des individus asociaux. La pratique psychanalytique semble donc atrophier nos dispositions à l’altruisme. »

« Les successeurs de Freud soutiennent que toutes les formes de restrictions et d’obligations dictées par le société ou par nos normes intérieures, entravent notre réalisation personnelle et nous éloignent de notre identité… mais dans ce cas il serait impossible de vivre en société… Une jeune américaine m’a dit : pour être véritablement moi-même, pour être libre, je dois être fidèle à mon ressenti et exprimer spontanément ce qui me correspond et me convient le mieux… »

Or, la véritable liberté ne consiste pas à faire tout ce qui nous passe par la tête, mais à être maitre de soi !

 » Gandhi disait : la liberté extérieure que nous atteindrons dépend de la liberté intérieure que nous aurons acquis. Si telle est la juste compréhension de la liberté, notre effort principal doit être consacré à accomplir un changement en nous-mêmes . Cette transformation…consiste précisément à diminuer notre égocentrisme et à cultiver l’altruisme et la compassion. »

Ceci est le véritable programme pour vos bonnes résolutions de premier janvier !

 

*nota : Au départ il s’agit de mettre en présence un enfant qui commence à peine à marcher (moins de 18 mois) qui voit quelqu’un qui fait semblant de taper un autre enfant , au bout d’un petit moment il intervient contre la personne qui fait semblant de taper ; puis  on abaisse l’age des enfants en présence (bébés pas encore en âge de marcher) en montrant des poupées qui sont censées l’une être gentille, l’autre méchante (elle tape l’autre poupée) et,  le bébé comprend laquelle est la méchante poupée et  quand on lui demande d’en choisir une des deux,  il choisit la gentille.

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