Qu’est ce que l’ombre et qu’est ce que le mal et, quelle est la part du mal dans notre ombre ?
Qu’est-ce que l’ombre ?
Elle est constituée par le refoulement d’interdits.
Pour Jung il s’agit de concepts vastes qui sont dans l’inconscient avec en plus le refoulé freudien.
Elle peut être positive ou négative. C’est souvent « la paille qu’on voit dans l’œil de son voisin, tandis qu’on ne voit pas la poutre dans le sien » et, lorsqu’on est exaspéré par quelqu’un c’est souvent parce que ça éveille une résonance, en nous.
Il est possible que cette résonance soit une culpabilité refoulée, sorte de « ma main droite ignore ce que fait ma main gauche ».
Au positif, on est pris dans le désir des autres, on ne fait pas ceci ou cela alors qu’on devrait le faire, ces choses nous inquiètent.
Le risque, c’est de croire qu’on est ce qu’on croît être, alors qu’on est un ensemble de personnalités.
Peut-on parler de sous personnalités ? Oui, à cause du manque de conscience de soi.
Pour ne pas succomber, nous devons prendre conscience de ces parties de nous-mêmes : par exemple, la réunion où quelqu’un vous énerve, et vous met en colère, c’est peut être dû au fait que vous projetez votre ombre, sur cette personne à laquelle vous attribuez des idées, qui en fait sont les vôtres quelque part au plus profond (ça le fait remonter au conscient). C’est comme une possession.
Nous devons également, nous positionner en face de nos projections sur les idéologies.
L’ombre peut s’insinuer dans les rêves (l’analyste soigne ainsi) où l’on peut découvrir que la personne du même sexe, en fait, c’est nous.
Il faut se méfier du masque, (la Persona) qu’on revêt en société. Peu de gens acceptent d’en faire état, car ils pensent que «tout ce qui est mal vient de l’extérieur».
Quelle est la part de « mal » tapie dans l’Ombre ?
Le mal est différent de l’Ombre, l’Ombre interroge notre responsabilité individuelle.
Mon Ombre inconsciente peut conduire au mal, mais elle peut être positive. C’est moi qui pense que ce n’est pas bien d’être ceci ou cela parce que j’ai honte, des complexes, des principes qui m’ont été transmis, des interdits qui me bloquent : ce qui est en cause, c’est notre incapacité à ne pas le voir (nous sommes un tissu de paradoxes).
On s’identifie au (soi disant) positif, en ignorant le reste en nous (quelquefois c’est le contraire à cause de la culpabilité), mais l’ombre et le mal, ce n’est pas la même chose. Le mal vient de l’extérieur, mais les choses sont aimantées par nous, car on peut dire, maintenant qu’on sait que l’homme n’est pas séparé de l’univers, qu’il fait partie intégrante d’un système.
Chacun a sa propre relation au mal, le mal est liée à la fonction moins développée en nous. Nous pouvons être développés à certains niveaux et pas à d’autres, cette fonction se rattrapera : pour les uns, c’est la fonction pensée qui oublie la fonction sentiment, la personne est toujours entrain de juger les autres car pour elle, le mal vient toujours de la relation aux autres.
La pensée occidentale, complètement imbibée de judéo-christianisme (même chez les athées) considère plusieurs styles de dieux, et ils sont au centre de la question du bien et du mal. Or, comment un dieu lumineux peut-il avoir crée le mal ?
Pourtant, l’homme se positionne en face de quelque chose qui est une puissance d’affirmation et, de destruction qu’il appelle le Soi ou Dieu et c’est un mélange de bien et de mal.
Les penseurs occidentaux sont tous restés dans la perfection du dieu des « lumières » (XVIIIe) or si dieu est Un, le mal vient aussi de dieu.
Nous simplifions trop, la réponse vient de l’orient : On peut assimiler cela au karma.
Le mal est un esprit de négation : vous êtes dans le non, qui est un refus de la vie dès que vous êtes déçu, il vient comme une force de la nature vous submerger.
Les solutions :
Les religions ont échoué à civiliser l’homme, ce sont des voies de passage qui peuvent nous aider à transcender. La prière, la méditation, les analyses sont des solutions mais en sachant que toute avancée crée une ombre. Tout cela aide à nous mettre en ordre, à être aligné.
Les traditions ont laissé dans l’ombre, la matière. Or nous sommes aussi des animaux, la matière se venge par les guerres, le matérialisme excessif.
L’excès, la démesure sont facteurs de mal (addictions, mépris d’autrui dominent). Il y a un désir qui passe l’infini, une société qui conduit à tous les excès. Il y a un déficit de la loi du père. La sociologie parle de rapports dominants-dominés.
C’est en se modérant qu’on y arrivera, car nous avons chacun notre part, nous ne sommes pas assez enracinés, nous avons un défaut d’intériorité. Cela ne se fera jamais par des moyens extérieurs. Les remèdes ne sont pas de nature politique, après des années, on voit que ça ne marche pas, malgré l’humanisme. Il faut une transformation intérieure de la société, un travail d’identification de nos complexes, car il y a un lien entre les gens et la société, le clivage est quelque chose de désastreux, c’est un insuccès. Le clivage en nous, c’est le clivage de la société. Mettre de l’ordre en soi, met de l’ordre dans le monde.
d’après l’interview de Bertrand de la Vaissiére, psychanalyste jungien, sur Baglis TV